« Francardo nagori » Flavia Mazelin-Salvi (Ed Punto e Basta,2023) par Namaria Luciani

 

Francardo, Francardu : village s’étirant le long de la route nationale et de la voie ferrée qui relient Bastia et Ajaccio. Réputé pour ses températures caniculaires durant l’été et ses gelées hivernales. Des centaines d’automobilistes le traversent chaque jour sans laisser de traces.

Nagori : selon l’auteure, «  la trace, la présence, l’atmosphère d’une chose passée, d’une chose qui n’est plus ».

Francardo nagori : recueil poétique de traces de Flavia Mazelin Salvi dans lequel elle porte un regard naïf mais très lucide sur la vie, la mort, l’absence… Elle observe le monde depuis la cuisine de sa grand-mère, Ernestine, qui naquit et vécut à Francardo. À partir de l’histoire singulière de son aïeule ainsi que de ce village atypique, elle conte l’humanité, passant avec agilité du particulier à l’universel. Ernestine était l’incarnation de la mixité, tant culturelle que sociale. Elle se sentait tout à la fois une immigrée ( ce dont elle n’avait absolument pas honte) et profondément Corse. Comme plusieurs francardacci, car Francardu, rare village corse au passé industriel, fut et reste un formidable creuset où se sont fondus et où se mélangent encore Corses des villages environnants, Continentaux, Italiens, Russes, Polonais, Hollandais, Algériens, Marocains…

Francardo nagori est aussi un très bel objet, un livre décousu et recousu, aux pages bleu pétrole, sépia… sur lesquelles se bousculent photos de torchons, de paysages, de portraits, d’ustensiles de cuisine, polices de caractères désuètes, dessins…

Lisez «  Francardo nagori » et vous ne traverserez plus Francardu, mais aussi l’existence, de la même manière Ralentissez, regardez votre rétroviseur et vous y verrez la cheminée d’une ancienne briqueterie, les ruines des fours à chaux… Le reflet de vies à la fois si diverses et tellement semblables, lesquelles, comme la vôtre, sont façonnées par les traces de votre histoire ainsi que de celle des autres.

Namaria Luciani